In Memoriam Pierre-Sylvain Filliozat

C’est avec grande tristesse que nous apprenons le décès de Pierre-Sylvain Filliozat, survenu à Paris le 28 décembre 2024. Né à Neuilly-sur-Seine le 15 février 1936 et fils de l’indianiste Jean Filliozat, qui a été pendant longtemps le directeur de l’École française d’Extrême-Orient ainsi que le fondateur et premier directeur de l’Institut Français de Pondichéry, Pierre-Sylvain Filliozat a bénéficié d’une éducation indianiste des plus remarquables, en partie en France (INALCO, EPHE), en partie à Pondichéry, notamment auprès de deux pandits : M.S. Narasimhacharya (IFP), spécialiste de la tradition grammaticale sanskrite, et N.R. Bhatt (EFEO), spécialiste de la littérature śivaïte.

Cette formation est reflétée dans son œuvre scientifique large et variée. Ses premières publications majeures concernent la rhétorique sanskrite (Le Pratāparudrīya de Vidyānātha, Pondichéry 1963) et la poésie (Œuvres poétiques de Nīlakantha Dīkṣita, Pondichéry 1967), puis la grammaire sanskrite (Le Mahābhāṣya de Patañjali avec le Pradīpa de Kaiyaṭa et l’Uddyota de Nāgeśa, Pondichéry 1975–1987). Il a continué à publier dans ces domaines, mais il a fait aussi des contributions majeures aux études des traditions śivaïtes, notamment avec ses éditions et traductions des ouvrages de Sadyojyotis (VIIe siècle), un des premiers théologiens śivaïtes dont les écrits aient survécu jusqu’à nos jours.

Depuis le début des années 1990, lui et son épouse Vasundhara Kavali-Filliozat, épigraphiste et spécialiste de l’histoire de l’art, partageaient leur temps entre Paris et Mysore, ce qui leur a permis de se pencher sur l’art religieux et l’architecture du Karnataka, donnant lieu à plusieurs publications, celle de la plus grande envergure étant Hampi — Inde sacrée, Inde glorieuse, publiée simultanément en français et en anglais en 2021 (Milan).

Il a reçu de nombreuses distinctions au cours de sa vie, non seulement en France (Chevalier de la Légion d’Honneur ; Chevalier de l’Ordre national du Mérite ; Commandeur de l’Ordre des Palmes académiques), mais aussi en Inde, où il s’est vu décerner la Padma Shri, la quatrième plus haute distinction civile, en 2024.

Membre de l’École française d’Extrême-Orient de 1963 jusqu’en 1967, il a toujours gardé un œil attentif sur elle, siégeant pendant de nombreuses années au sein de ses Conseils. De 1967 à 2004, il a été directeur d’études à l’École Pratique des Hautes Études (section des sciences historiques philologiques). Élu membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres au fauteuil de Raymond Bloch en 2000, il y a exercé en 2010 les fonctions de Président. Il a également soutenu les autres institutions françaises qui promeuvent les études sur l’Asie du Sud et du Sud-Est, dont la Société Asiatique et l’Association française pour les études indiennes.

Outre son engagement très actif dans toutes les institutions et sociétés susmentionnées, lui et son épouse ont, pendant des décennies, accueilli avec courtoisie d’innombrables étudiants et chercheurs chez eux à Mysore et à Paris, leur offrant hospitalité et stimulation intellectuelle. Il manquera cruellement à beaucoup, tant en Europe qu’en Inde, où le Premier ministre Shri Narendra Modi a présenté ses condoléances. Il laisse dans le deuil sa femme et ses deux filles, Manonmani et Bhamati, ainsi que leurs familles.