Eric Bourdonneau

Les travaux d'Eric Bourdonneau portent sur l'histoire du Cambodge ancien. Le thème de l'indianisation constitue un axe privilégié de ses recherches, envisagé selon deux approches complémentaires.

La première se concentre sur les débuts du processus d'indianisation, contemporains de la formation du royaume du Funan dans les premiers siècles de notre ère. Une étude est menée sur l'ancien réseau hydraulique du delta du Mékong, dont la réalisation a joué un rôle essentiel dans l'histoire de ce premier État indianisé. Cette étude fournit la matière d'une réflexion plus large sur l'histoire agraire du Cambodge, relevant davantage de l'histoire sociale et culturelle que d'une histoire économique étroitement définie.

La seconde approche se développe autour de la thématique des lieux saints et s'attache à leurs « mises en forme » successives à l'époque angkorienne et préangkorienne. Dans le cadre de ce programme intitulé Kamraten Jagat, Eric Bourdonneau a mis en place en 2009 une mission archéologique sur le site de Koh Ker et le complexe du Prasat Thom, « lieu saint royal » s'il en est. Localisé à 80 km d'Angkor, le site correspond à l'ancienne capitale bâtie par le roi Jayavarman IV dans la première moitié du Xe siècle. C'est au temple du Prasat Thom qu'apparaît pour la première fois la mention du fameux culte du kamraten jagat ta râja/râjya (le devarâja des inscriptions plus tardives) qui associe de façon inédite la royauté angkorienne et la sphère divine. Les recherches se sont concentrées dans un premier temps sur l'examen du programme architectural et surtout iconographique de ce temple, permettant une compréhension renouvelée du devarâja. Cette relecture d'une thématique qui a suscité de nombreux commentaires, parfois très éloignés des sources, est également entreprise en reprenant l'examen critique des inscriptions, avec toujours ce même souci d'adopter le point de vue d'une histoire sociale et culturelle là où l'historiographie s'est surtout préoccupée d'articuler ensemble le politique et le religieux. Ce travail vient alimenter une réflexion beaucoup plus générale sur la nature des sources disponibles (qu'il s'agisse des inscriptions, des images ou des formes du paysage) et leur qualité de « monument/document » pour l'historien. Ce qui fait notamment ici débat est le statut, bien mal établi, de l'histoire du Cambodge ancien comme discipline.